LAS AVES
« You Need A Dog. »
L’entité pop Las Aves revient avec un nouvel album dont l’intitulé « I’ll Never Give Up On Love Until I Can Put A Name On It » sonne comme une profession de foi. Mais que peut-on entendre de l’Amour à l’aube des années 2020 ?
Leur premier album « Die In Shanghai » (2016), produit par Dan Levy (The Do), avait laissé une empreinte insolente et durable dans le paysage trop souvent sage et cloisonné de la pop. Cette musique hybride s’illustrait alors dans une série de clips suivant des bandes de filles aux quatre coins du monde, dont le célèbre « N.E.M. ».
Pendant plus d’un an, Las Aves ont parcouru l’Europe (Eurockéennes, Sziget Festival, Liverpool Sound City, Great Escape, Vieilles Charrues…) et la Chine pour une série de concerts d’une stupéfiante modernité, alliant sans complexe guitares furieuses, cavalcades électroniques et RnB futuriste.
Le trio s’est ensuite plongé, deux ans durant, dans les abysses mystérieux d’un studio parisien. Il refait surface aujourd’hui, pour mieux dépeindre les affres de l’amour à l’ère du numérique.
Produit par l’électron libre de la techno hardcore Lucien Krampf, ce concept-album 3.0 pourrait être une peinture réaliste de l’amour esquissée en rose et gris métallisé. Un amour violent, dématérialisé mais puissant.
Mixés par l’anglais Geoff Swan (Charli XCX, Grimes), les 11 titres de l’album sont d’abord des chansons d’amour sincère, passées au crible de machines bruyantes et dangereuses. En ressortent des titres percutants, billes d’acier au coeur guimauve, narrant la violence émotionnelle dans un écrin de soie.
« I’ll Never Give Up On Love Until I Can Put A Name On It » est un disque frontal, presque brutal, aux bords tranchants comme la lame d’un rasoir, qui se fait le porte-étendard d’une époque et d’une génération toutes entières. Ouvert par le caustique You Need A Dog, tirade désabusée et pleine d’ironie, le disque baisse progressivement sa garde pour laisser entrevoir de véritables moments d’émotions que ses gros beats technos ne sauraient démentir, comme sur le très beau Baby ou le sensuel Tomorrow. Témoignages de la faculté du groupe à se frayer un chemin à travers les références et les univers, Cancel On Me, Latin Lover sont autant d’incursions réussies dans des registres qu’on aurait cru remisés au placard, et qui sont ici ravivés avec une audace rafraichissante, quand + est une transe chaotique dans les méandres d’une pop électronique d’un genre nouveau. Enfin, Thank You clôt le disque par la balade poignante et étonnamment dépouillée, qui guide nos émotions à travers les délicats entrelacs de la voix suave de Géraldine.
« C’était important pour nous de traduire la violence et la beauté de l’amour, l’alchimie issue de ce paradoxe. On a voulu faire des hits pop remplis de pièges et d’aberrations, viser le coeur avec des flèches de fer. »
Las Aves offre un roman-photo musical puissant et addictif, dont les mélodies accrocheuses viennent s’agripper au coeur, sans autre détour.
Avec ce deuxième essai, le groupe signe le manifeste pop de son époque, parsemé de selfies robotiques et de larmes organiques.
Las Aves = Géraldine Baux, Jules Cassignol, Vincent Argiolas